MASSILIA SOCIOS CLUB : DROIT DE REGARD OU DROIT DANS LE MUR ?
07 oct. 2016Salut les Fastfooters. Ces derniers temps, les supporters refont parler d'eux. A Paris, les Ultras redonnent progressivement de la voix au Parc des Princes. A Lorient, ils doivent encourager leur équipe à défaut de quoi, ils verront le prix des abonnements augmenter. A Marseille, la ferveur au sein du Vélodrome se meurt au fur et à mesure que les résultats déçoivent mais la perspective de lendemains qui chantent est incarnée par un homme : l'investisseur américain Franck McCourt. Mais à l'OM, peut-être plus qu'ailleurs, l'importance des supporters n'est plus à démontrer. Et pour ne pas être occultés par le futur repreneur, des supporters ont lancé en janvier, "Massilia Socios Club", un projet qui tend à impliquer une entrée du capital des "socios" (supporters) dans le club. Thefastfoot s'est intéressé à ce phénomène. Louable, peut-il être durable ? On attend vos commentaires en bas de cet article.
1. La France ne parle pas très bien "socios"
Le terme de "socios" est connu de tous les passionnés de ballon rond. Pour beaucoup, il résonne comme une considération et une implication du public dans un club de football et peut même symboliser, dans un certains cas, un contre-pouvoir, notamment en cas de mauvais résultats. Pour devenir socios, les supporters doivent s'acquitter de droits d'entrée au sein du capital pour intégrer, à terme, le conseil d'administration et jouer un rôle consultatif de premier plan. De son côté, le club, par la contribution financière de ces socios, augmente son capital.
J'ai franchi le pas!
— TomtOM (@Tomtom_C) 7 octobre 2016
Ca me semble le seul moyen pour les supporters de faire entendre leur voix.
l'OM, c'est nous!
cc @om_socios#TeamOM pic.twitter.com/IycLTh14US
Cette dose de "pouvoir" allouée aux supporters est parfaitement administrée dans les rouages des clubs espagnols et se répand, progressivement, au coeur des formations allemandes et anglaises. En France, ces initiatives de supporters pour peser dans les décisions des clubs existent. A Nantes, l'association "A la Nantaise" joue ainsi un rôle croissant au FC Nantes, et ce depuis 6 ans déjà.
"A la nantaise obtient de jolis succès et ne compte pas s'arrêter là" @presseocean #FCNantes #Nantes pic.twitter.com/o2SJha7zTS
— A la nantaise (@a_la_nantaise) 3 octobre 2016
Créée en 2010, alors que le FCN se morfondait en Ligue 2, "A la Nantaise" regroupe aujourd'hui pas moins de 2300 adhérents, soit un quart environ du nombre d'abonnés cette saison (8800). Une partie de ces adhérents organisent même une levée de fonds - qui s'élève actuellement à 35000 € (soit 7% du capital du club) - afin d'avoir un droit de regard dans les décisions prises. C'est d'ailleurs l'une des raisons définies par l'association sur son site, www.asso-alanantaise.com.
Amplifier le montant de la levée de fonds recueillie par la SAS A la nantaise destinée à permettre aux supporters nantais de détenir une partie du capital du club pour contribuer à sa gestion : Yes, we Canaris !"
Depuis sa fondation, "A la Nantaise" tente de se faire entendre à l'échelle nationale, notamment pour défendre ce modèle "socio", encore à un état embryonnaire, même du côté de la Beaujoire. Ainsi, le quotidien Ouest-France révèle que l'asscoaition a déposé une proposition de loi à l'Assemblée et au Sénat sur la question de la représentation des supporters dans les organes de décision du football.
On souhaite que le club s'ouvre à l'actionnariat populaire. Pour être les premiers en France à concrétiser ce projet. Ce modèle de gouvernance a démontré son efficacité dans les grands pays de football. Kita partira un jour et il faudra que notre projet se mette en place. Car les supporters sont les seuls qui sont et seront toujours là dans un club."
A Marseille, quelques fans se sont lancés dans un projet comparable il y a dix mois, dans la perspective d'une vente du club. Ce projet passe aujourd'hui à la vitesse supérieure afin de se faire entendre dès l'entrée en fonction du nouvel actionnaire majoritaire de l'OM, Franck McCourt.
2. Un financement participatif pour co-diriger
A l'instar du FC Nantes, le projet marseillais, baptisé "Massilia Socios Club" a pour objectif de ne pas laisser de côté les supporters dans les prises de décision du club. Avec ce projet, les fans de l'OM entendent bien s'immiscer dans les affaires du club.
Faire que l'histoire de l'OM ne s'écrive plus sans les supporters."
Depuis le début du mois de janvier, un système de financement participatif a été mis en place par les fondateurs de "Massilia Socios Club". Ainsi, pour devenir un "socio" de l'OM, il faudra débourser 80€ d'adhésion pour entrer dans le capital, puis 120€ de cotisation annuelle par la suite. Mais comme toute opération de financement participatif, en cas d'échec du projet, tout le monde sera remboursé. Pour l'heure, "MSC" compte 2000 adhérents, parmi lesquels des anciennes gloires de l'Olympique de Marseille. En termes de chiffres, l'objectif fixé par l'association serait d'augmenter le capital du club à hauteur de... 20 millions d'euros. Pour tenter d'atteindre cette somme, pas moins de 30000 tracts seront distribués aux abords du Vélodrome, lors de la rencontre OM - FC Metz du dimanche 16 octobre (20h45).
🔵⚪️ @om_socios propose désormais une pré-inscription à 30€. Rejoignez-nous ! https://t.co/EvrUkHzLvK pic.twitter.com/0yoceAFnRT
— Massilia Socios Club (@om_socios) 16 septembre 2016
"En regroupant 2 % des supporters de l'OM avec un apport de 10€ par mois, le Massilia Socios Club pourrait augmenter le budget de l'OM à hauteur de 20 M€"
On est pratiquement 2000. Ce n’est pas suffisant. A court terme, nous aimerions nous positionner, comme l’Athletic Bilbao, au niveau de 40000 socios."
3. McCourt à l'écoute
Au fil des semaines, l'écho de l'initiative "Massilia Socios Club" est de plus en plus audible, notamment du fait de soutiens d'anciennes gloires et présidents du club marseillais (Eric Di Meco, Jean-Pierre Papin, Pape Diouf...). A la fin du mois de septembre, des représentants de "MSC" étaient présents aux assises des supporters de France et sont entrés en contact avec Didier Poulmaire, le conseiller de Franck McCourt. Ce dernier, à l'instar du probable futur président de l'OM, Jacques-Henri Eyraud, est favorable au mouvement "socios" à l'OM.
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Les gloires de l'OM s'engagent
De doux rêve utopiste, le projet du Massilia Socios Club prend de jour en jour davantage de consistance. Quel supporter olympien n'a jamais songé à tout ce qu'il ferait pour le club de son coeur...
http://www.laprovence.com/article/om/4054275/les-gloires-de-lom-sengagent.html
Ce système permet à l’actionneur de s’associer à long terme à une vision des supporters. Nous serions un partenaire financier. Nous serions un outil marketing pour le club. Exemple : Adidas pourrait nous faire part de plusieurs maillots en guise de test afin de déterminer celui qui plaît le plus. Nous serions à ce moment-là un outil de sondage gigantesque. Et enfin, nous serions un outil pédagogique. On a tous tendance à critiquer les décisions prises. En étant partie prenante, ces critiques nous pourrions les éteindre naturellement."
Les socios de l'OM souhaiteraient être associés au projet "OM Champions Project" défendu par Franck McCourt. Si "Massilia Socios Club" prend suffisamment d'ampleur, l'homme d'affaires américain pourrait devenir l'un des premiers dirigeants de l'Hexagone à mettre autant en avant les supporters dans la gestion d'un club. Cette initiative, si elle fonctionne, sera forcément associée à son nom. De plus, McCourt devrait voir d'un très bon oeil l'augmentation du capital à hauteur de 20 millions d'euros, comme souhaitée par les fondateurs du mouvement. Mais attention, cette alliance avec les supporters n'est pas sans condition...
L'argent des adhérents du "Massilia Socios Club" deviendra quoi? Il va permettre de payer les vacances aux Seychelles de son créateur?
— Hlehli (@Da_Ehli) 30 août 2016
4. Que veulent les "socios" marseillais ?
La mise en place de "Massilia Socios Club" a pour première préoccupation de faire exister les supporters aux yeux du nouvel actionnaire majoritaire, Franck McCourt. Certains supporters marseillais craignent une marginalisation des groupes de supporters, à l'exemple de Qsi au Paris Saint-Germain. Puis, dans un deuxième temps, si le projet "socios" aboutit, ces derniers auront des revendications à faire entendre.
Nous n’aurons pas vocation à s’immiscer dans le sportif, de dire oui ou non à tel ou tel joueur. Nous aurons vocation à être transparents et garants d’une bonne gouvernance du club envers ses supporters (...). Nous aurons pour objectif de reconnecter l’OM à son territoire. Nous voulons mettre notre argent à disposition du club aux bons endroits. Pour nous, la formation est un point à améliorer."
Ce serait bien que le public soit partie prenante des affaires du club. On a toujours voulu avoir un représentant au sein du conseil d'administration, pas en tant que décideur mais plutôt comme consultant, et ça ne s'est jamais fait."
Et plus ils seront nombreux, plus Franck McCourt devra apporter des réponses rapides pour ne pas voir le Vélodrome se retournait contre lui. Ainsi, la formation marseillaise et l'intégration de joueurs issus du "tissue local" est l'une des préoccupations des membres actuels de "MSC". Pour autant, quel sera le véritable contre-pouvoir des "socios" de l'OM en cas d'échec du projet McCourt?
Supporters marseillais en colère https://t.co/gpErIVHcvD et en mode nous voulons être des socios
— Massilia Socios Club (@om_socios) 18 février 2016
5. Vers un contre-pouvoir impossible ?
Même dans l'hypothèse que les "socios" marseillais versent 20 millions d'eurosau capital de l'OM, ceux-là ne pourront pas renverser Franck McCourt en cas de contre-performances. Les "socios", dans le modèle défendu pour l'heure par "Massilia Socios Club", ne peuvent pas intervenir directement dans le domaine sportif. En revanche, dans l'hypothèse de mauvais résultats, ils manifesteront leurs désaccords avec la politique menée par Franck McCourt. Ainsi, le président (Jacques-Henri Eyraud) devrait être le premier bouc-émissaire. Pour les choix sportifs (coach, joueurs), la décision en revient à l'actionnaire majoritaire, qui injecte directement de l'argent dans le club. Dès lors, les "socios" n'auront qu'un rôle consultatif. Mais attention, à Marseille et peut-être plus qu'ailleurs, les traitionnels mouvements de contestation pourraient rapidement faire leur retour en tribunes.
OM : Benny Hill, banderole, chèvres… Les messages des supporters contre Bordeaux https://t.co/oXFiRyj8fh pic.twitter.com/MrUo8zpaXp
— OM Live News (@RdP_OM) 10 avril 2016
6. A des années-lumières du Real et du Barça
Le "socio" imaginé par le projet "Massilia Socios Club" n'est pas aussi puissant que celui du Real Madrid ou du FC Barcelone, où ce système, dans l'organisation politique et sportive de l'institution est roi. Dans les deux clubs phares du football espagnol, le Socio débourse entre 700 et 1000€ de cotisations par an, soit 7 à 10 fois plus que le socio marseillais. Ainsi, la participation au capital de ces derniers est considérable et deviennent, de fait, plus audibles auprès du président. Ce dernier doit rendre des comptes aux socioq, même si sa voix équivaut à celle d'un supporter au moment du vote. Car oui, au Real comme au Barça et dans d'autres clubs qui ont instauré le système "socio", le président est désigné au terme d'une campagne électorale particulièrement relevée. Le véritable pouvoir est donc bien entre les mains des socios du fait de leurs contributions très importantes.
La Asamblea de Socios del Barça aprobará la moción de confianza a la actual Junta Directiva https://t.co/RErrGFPbLT pic.twitter.com/MS8Rm4zn1Q
— CatalunyaPress (@Catalunya_Press) 27 septembre 2016
A titre d'exemple, en 2008, Florentino Pérez s'est fait réélire président du Real Madrid avec, comme politique, l'intronisation des "néo-galactiques". Une promesse onéreuse rendue possible par la contribution des socios, qui s'élèvait alors, à cette époque, à pas moins de 700 millions d'euros. Le rapport entre l'échelle marseillaise et celle des équipes espagnoles n'est pas comparable. A noter également que le président n'injecte pas directement d'argent dans l'institution, à la différence d'un Franck McCourt. Ainsi, Florentino Perez, homme de réseau certes, n'a pas injecté le moindre centimes dans son coûteux projet.
Florentino Pérez gana a los socios demandantes: no habrá repetición de elecciones
— eco_futbol (@eco_futbol) 11 février 2016
https://t.co/84COG4eNLc pic.twitter.com/53k7OXRPTZ
"Massilia Socios Club" pourrait devenir le premier véritable modèle de socios en France. L'initiative est louable, les soutiens de renom s'accumulent et "MSC" a un véritable programme à faire valoir auprès de ses futurs dirigeants (formation, tissue locale, représentativité...). Cependant, les moyens, humains et donc financiers, ne sont pas encore réunis pour peser efficacement et durablement sur les destinés de l'OM et de son futur actionnaire, Franck McCourt. Le projet "Massilia Socios Club" dépend considérablement des résultats à court terme de la future équipe. En cas de succès, le stade se rempliera de nouveau et le nombre de socios ne pourra qu'accroître.
OM : Un indice décisif pour McCourt et le Vélodrome https://t.co/XqYbWcVymX pic.twitter.com/b3oybZNOY7
— Foot01.com (@Foot01_com) 30 septembre 2016
En revanche, dans le cas contraire, le mouvement s'apparentera à celui de Nantes, jouant un rôle d'acteur consultatif, défendant certes des sujets à l'échelle nationale, mais sans prise directe sur la politique menée par son actionnaire prioritaire. L'argent oui, mais les résultats sportifs sont, comme toujours dans le fooball, le seul facteur déterminant. Ainsi, la "MSC" est une idée louable à défaut d'être durable... pour le moment.
Etes-vous convaincu par le projet socios de l'#OM, "Massilia Socios Club"? #TeamOM #Ligue1 #OMFCM
— THEFASTFOOT (@thefastfoot) 7 octobre 2016